Comment en est-on venu à boire autant de mauvaise pi(l)s ?

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Comment la lager est-elle devenue la boisson la plus consommée au monde au détriment de la variété ? Pourquoi le monde entier s’est mis à ne consommer qu’un seul type de bière, de la pilsner bas de gamme ? Des questions qui vous ont sans doute trotter dans l’esprit. Voici quelques éléments de réponses en quelques lignes.

Quand l’on pense qu’avant la révolution industrielle et la naissance de la réfrigération, il n’existait pas vraiment de bières de fermentation basse, on se demande comment en moins d’un siècle les lagers sont passées d’inexistante au type de bière le plus consommée du monde. Cette bière dorée et claire faisant la sensation en Europe au XIXè siècle avec l’avènement des nouvelles technologies de réfrigération a terminé de conquérir le monde aux USA où les immigrants européens germanique emportèrent avec eux le secret de fabrication des lagers pour les rendre populaires outre-atlantique. Les néo-américains emmenèrent avec eux levures et recettes de leurs pilsners préférées pour les brasser aux Etats-Unis. Sauf que les malts américains étaient légèrement différents des malts allemands (6 rangs contre 2 rangs). C’est ainsi que peu à peu l’adjonction de maïs ou de riz dans la pilsner américaine (pensez budweiser) est devenue la forme de fabrication. Un développement de la culture brassicole américaine qui s’est brutalement interrompue pendant la prohibition et qui n’est jamais réellement redevenu ce qu’il était avant celle-ci. On distingue ainsi désormais les lagers pre-prohibition et les lagers post-prohibition. Les bières d’avant la prohibition étant souvent décrites comme plus aromatiques et plus savoureuses. Elles étaient notamment plus houblonnées, plus légère en alcool mais avec un corps plus important (densité finale plus haute). Au même titre que le nombre de brasseries a drastiquement diminué avec cette période d’interdiction de la fabrication d’alcool, la variété et la qualité des fameuses US lagers a fortement décliné. C’est alors que la boisson la plus consommée au monde est devenue ce que nous connaissons aujourd’hui, la lager américaine blonde, sèche, aqueuse, peu pétillante, très diminuée en saveurs et au goût complètement homogénéisée. Il faut dire que seul les plus gros poissons ont pu survivre à cette période difficile et que le projet n’était pas forcément de produire la meilleure bière possible. Surtout après une période de 13 ans d’interdiction de brasser.

Pourtant, preuve de la variété en terme de goût des lagers d’avant la prohibition, il existait même des lagers épicées. Il est vrai qu’on se demande souvent aujourd’hui si on a le droit d’utiliser des adjuvants dans une lagers. Une mauvaise restriction sans doute transmise par les fameuses lois de pureté allemandes. Avant la prohibition, les lagers américaines étaient très variées, on distinguait notamment lager de l’est et lagers de l’ouest, on trouver des lagers aux épices mais aussi des bocks américains.

Tandis qu’aujourd’hui, la craft pilsner est le style le plus en vogue du moment aux États-Unis, on commence à retrouver un peu de variété dans nos lagers. Après avoir souffert pendant de nombreuses années de la mauvaise réputation des post-prohibition lagers, la norme internationale de la seconde partie du XXème siècle, les brasseurs reviennent de plus en plus vers les lagers traditionnelles et l’on retrouve diversité et innovation dans nos lagers. Reste à expliquer aux consommateurs qu’une lager doit coûter plus cher qu’une ale. En effet, j’ai souvent constaté en France que le frein principal que les brasseurs rencontrent pour produire des lagers est la durée d’immobilisation des cuves. Une bonne lager est plus longue à fermenter, elle ne doit pas être la bière pas chère, standardisée et sans saveurs que les brasseurs industriels nous ont vendu pendant un demi siècle. Ce temps, c’est un prix du demi qui doit être plus élevé que le prix d’une pale ale classique. Pour donner une chance aux brasseurs de brasser plus de lagers, il est important que les consommateurs de bière soit bien conscient de cela et j’espère que petit à petit, les lagers retrouveront des lettres de noblesse en France aussi.

Sources :

Explorations in Pre-Prohibition American Lagers  By George J. Fix http://morebeer.com/brewingtechniques/library/backissues/issue2.3/fix.html
How the Pilsner Beer Style Conquered the World https://www.craftbeer.com/craft-beer-muses/pilsner-beer-that-conquered-the-world
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mage à la une : Thomas Hawk sur Flickr

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A propos de Thomas

Dès sa plus tendre enfance, Thomas a été un enfant choyé par ses proches et amis. Il est important de savoir que "Bartom", son pseudo, vient de sa fréquentation assidue des bars. Voir la description complète de Thomas→

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