Comment produire, vendre et distribuer sa bière ?
Ça y est ! Après de nombreux brassins plus ou moins réussis, tu penses avoir enfin trouvé la formule idéale.
- L’équilibre Malt/Houblon est parfait ;
- Le ratio Amertume/Acidité exceptionnel ;
- La couleur un vrai régal pour les yeux.
Bref, tu es le Léonard de Vinci des Brasseurs de France.
Tu envisages même de profiter de la prochaine fête de l’Association dont tu es membre pour distribuer ta bière dans un stand.
Cependant, tu ignores totalement les démarches à entreprendre pour éviter d’être pris en faute.
Pas d’inquiétude, tu trouveras ci-dessous un résumé de tes principales obligations dans le cadre de la production et la distribution de bière.
Bon, avant même de commencer, vérifions que ta production correspond bien à l’appellation bière.
La bière est définie par le décret 92-307 du 31 mars 1992 comme suit :
La dénomination « bière » est réservée à la boisson obtenue par fermentation alcoolique d’un moût préparé à partir du malt de céréales, de matières premières issues de céréales, de sucres alimentaires et de houblon, de substances conférant de l’amertume provenant du houblon, d’eau potable. Le malt de céréales représente au moins 50 p. 100 du poids des matières amylacées ou sucrées mises en oeuvre. L’extrait sec représente au moins 2 p. 100 du poids du moût primitif.
La bière, c’est donc une boisson :
- Obtenue par fermentation,
- Préparée à partir du malt de céréale qui compose au moins 50 % des matières amylacées ou sucrées, de houblon et d’eau potable,
- Dont l’amertume est issue du houblon,
Si l’un de ces critères n’est pas respecté, tu peux arrêter la lecture et commencer à rechercher l’identité de ce que tu as produit ailleurs sur le net car ce n’est pas de la bière.
Si tous les critères sont remplis, tu as bien produit une bière et tu peux poursuivre la lecture.
Le contrôle du processus de production
Tu t’apprêtes à distribuer un produit alimentaire avec l’ensemble des risques que cela peut présenter pour tes clients / adhérents.
Il te faut donc respecter des principes d’hygiène et de traçabilité de la production.
Le principe qui doit guider ta production est relativement simple ; Une bière doit être saine, sûre et loyale vis à vis du consommateur [Règlement (UE) n° 178/2002]
Pour te guider sur les conditions de votre production, vous pourrez vous reporter utilement aux principes HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point) :
En bref, la réalisation de contrôles à chaque étape du processus qui peut engendrer une infection.
Tu dois vérifier à chaque étape qu’aucun corps étranger de nature à en diminuer la qualité ou à le rendre impropre à la consommation ne s’y est introduit.
Pour les contrôles, tu as le libre choix des moyens utilisés pour assurer la qualité du produit mais demeure responsable de toute infection, notamment en cas d’indigestion du consommateur final [Règlement (CE) n°852/2004].
Il faut donc être particulièrement vigilant et certaines règles de base sont impératives :
- Contrôler l’origine des matières premières utilisées et en conserver les références,
- Désinfecter systématiquement le matériel avant utilisation (d’autant plus important que la qualité de ta bière en dépend),
- Veiller à assurer les meilleures conditions d’entreposage (hygiène de la zone et température de conservation),
Pour la traçabilité, tu dois identifier ta production par des numéros de lot dont tu conserveras précieusement les références.
Voilà, tu connais désormais les bases qui doivent guider ton processus de production.
Pour en savoir plus, tu peux consulter le guide des bonnes pratiques de la brasserie établi par le ministère de l’agriculture
Une fois la bière produite et mise en bouteille, il reste à préparer l’emballage.
Les étiquettes : mentions obligatoires
A vrai dire, tu n’envisageais même pas de mettre une étiquette.
Après tout, à ce stade, c’est une participation bénévole à une kermesse et tu as déjà dû subir des règles de production beaucoup plus rigide qu’à l’accoutumée.
Mais, dès lors que tu distribues un produit alimentaire, tu dois obligatoirement faire figurer sur l’emballage certaines mentions.
S’agissant de la bière, les mentions minimums obligatoires sont les suivantes :
- Quantité nette,
- Liste des allergènes (et notamment Gluten)
- Date de durabilité minimale
- Coordonnées de la brasserie
- Titre alcoométrique
- N° de lot,
Message sanitaire à destination des femmes enceintes (« La consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse, même en faible quantité, peut avoir des conséquences graves sur la santé de l’enfant »),
Après tu n’es pas forcé de faire une étiquette et de t’échiner à la coller. Une bonne vieille feuille A4 que tu enrouleras autour de la bouteille suffit amplement…
Courage, la production est prête. Tu y es presque. Tu n’as plus qu’une petite démarche à entreprendre et tu vas pouvoir faire découvrir tes œuvres.
La déclaration du stand et la demande d’autorisation
Même gratuite ou à des fins non lucratives, la distribution de bières au public doit être déclarée.
En effet, la bière contient de l’alcool et sa distribution est donc soumise à des conditions restrictives.
Rassure-toi, il ne s’agit pas là d’obligations extrêmement lourdes. Un simple courrier suffit.
La demande doit être présentée à la Mairie du lieu où se déroulera l’évènement au cours duquel la distribution aura lieu.
En bon fainéant qui a déjà trop bossé, tu pourras te contenter de recopier le courrier type mis gracieusement à disposition par l’Etat
Attention, ton courrier doit parvenir à la Mairie au plus tard quinze jours avant la date de l’événement.
Pour installer ta buvette, tu dois impérativement avoir reçu une autorisation expresse de la Mairie. L’absence de réponse de cette dernière s’analyse en un refus d’autorisation.
***
Tu es fin prêt pour distribuer tes bières et ainsi rapporter un peu d’argent à l’Association qu’elle pourra réinvestir pour ses bonnes œuvres.
Il ne reste plus qu’à préparer une production suffisante pour fournir les (très) nombreux amateurs de bière.
Il faudra veiller à ne pas servir les personnes déjà fortement alcoolisées qui se présenteront à toi.
En effet, le fait de servir une personne déjà en état d’ivresse est pénalement répréhensible.
Bonne distribution !
Pour en savoir plus
Article L.3321-1 du code de la santé publique
Décret 92-307 du 31 mars 1992
Règles relatives à la vente d’alcool
Guide des bonnes pratiques Brasserie
Association des brasseurs de France
novembre 25, 2017 at 2:25 pm
Bonjour,
article intéressant, merci. Le sujet parle de la distribution par une association. Faire une association est très simple, mais au niveau de la production vis a vis des douanes ? Il me semblais que du moment où l’on déclare un matériel de fabrication de bière, qu’on produise 1 litre pour vendre et 1hl pour consommation personnel, il faut tout déclarer en douane et payer la taxe même pour la partie consommation personnel (ce qui reviens chers). Est-ce que tu as plus d’information sur le sujet ?
novembre 25, 2017 at 6:01 pm
Le texte ne distingue en effet pas les raisons de la production s’agissant des droits de douane. Ainsi, si l’on adopte une appréciation littérale de la norme, tu as parfaitement raison, même le simple producteur/consommateur est assujetti.
Cela est cependant matériellement impossible de telle sorte que cette part du texte fait l’objet d’une tolérance.
La distribution ponctuelle dans un cadre associatif comme celle visée dans l’article fait d’ailleurs l’objet d’une tolérance similaire ne serait ce que du fait des difficultés de détection des infractions.
Le contenu de l’article vise bien une distribution ponctuelle et n’aborde pas les aspects sociaux et fiscaux en raison de la lourdeur que cela représenterait et de l’aspect ponctuel cité.
C’est la raison pour laquelle je n’ai pas développé ce point spécifique mais me suis concentré sur les conditions matérielles basiques de réalisation.
Il est certain qu’une personne qui souhaiterait développer une distribution régulière devrait alors se pencher sur l’ensemble des aspects liés à la commercialisation d’alcools et pas seulement s’agissant des droits de douanes spécifiques à la bière.
Je pense faire dans les prochaines semaines un article qui abordera justement les conséquences fiscales du développement d’une activité de distribution de bière qu’il s’agisse d’ailleurs des conséquences spécifiques telles que le droit d’accise ou des conséquences plus traditionnelles (droit de douane, tva etc…).
Dans un second temps, je ferai très certainement un point sur les conditions de création d’une entreprise artisanale (statuts, Rcs, chambre des métiers…)
novembre 27, 2017 at 10:46 pm
Bonjour,
Si je comprends bien, il n’y a pas de différence que ce soit notre production ou pas pour la vente par une association ?