Brasser une bière par décoction
Le brassage par décoction est une technique de brassage venant de l’est européen et plus précisément d’Allemagne et de République-Tchèque. Particulièrement utilisée pour la réalisation de lagers traditionnellement, elle peut toutefois être utilisée pour réaliser n’importe quel style de bière. Elle est notamment exploitée avec habilité par certaines brasseries craft tchèques telles que Matuska pour réaliser des India Pale Ales d’excellence.
La décoction est une technique d’empâtage qui permet d’accentuer les arômes maltés de la bière. Elle consiste tout simple à extraire une partie de la maîche pour la faire bouillir. Le bouillon chaud est ensuite réintégré à l’intérieur afin de passer au pallier de température d’empâtage supérieur. On peut répéter l’opération une à trois fois selon les paliers prévus pour la recette. On réalisera alors une simple, double ou triple décoction.
Intérêt de la décoction ?
La décoction repose sur un phénomène simple : la caramélisation. Scientifiquement, on l’appelle plutôt la réaction de Maillard, bien connue des Chefs en cuisine. En faisant bouillir une partie de la céréales et du moût, on favorise cette caramélisation. Cela va donner une bière un peu plus de corps et surtout avec un petit coup toasté, caramélisé fort agréable.
Explication vidéo du brassage par décoction
Comment faire un empâtage par décoction ?
C’est simple, lors de l’empâtage, réalise ton palier de température et lorsque celui-ci est terminé, tu prends un pichet, tu extraits la quantité de céréales nécessaire pour atteindre le pallier supérieur, et tu portes ces céréales à ébullition. Par simplicité, utiliser un logiciel de brassage comme Beersmith permettra de savoir quelle quantité extraire pour atteindre le palier de température suivant. Exemple : passer de 50°C à 64°C (environ 1/3 de la maîche) ou bien de 64°C à 70°C (environ 1/4 de la maîche).
Dois-je prendre la maîche ou le moût ?
Les commentaires semblent très partagés à ce niveau. Faut-il prendre du moût donc seulement le jus de la céréale ou bien la maîche donc les céréales et le jus. Pour ma part, j’ai choisi de prendre les céréales + le jus donc l’entièreté de la maische. Ce qui rend toutefois l’opération de précision plutôt complexe. Il est plus facile d’extraire 8 litres de jus que 10 litres de jus + grain pour être concret. Mais bon, après avoir lu quelques articles sur le sujet, j’ai l’impression que c’était quand même la solution privilégiée, ce qui semble logique pour favoriser la caramélisation du grain.
Avantages et inconvénients de la décoction
Avantages / bénéfices :
- goût malté très agréable
- remplace les malts crystals, avec un meilleur rendu je trouve (totalement subjectif)
- permet de caraméliser sans spécialement colorer
Inconvénients / difficultés :
- risque d’oxydation du moût chaud
- temps de brassage plus long
- précision des paliers de température pas simple à obtenir
Quels styles par décoction ?
TOUS !
Si traditionnellement, cette technique était utilisée pour les lagers bavaroise (helles, pils) ou tchèque (svetle, tmavé, polotmavé), on peut en réalité tout brasser par décoction pour des bières avec un vraie caractère malté.
Mais attention, ça ne veut pas dire bière maltée forcément. Comme j’en parle un peu plus haut, la base d’une bière bière houblonnée (IPA, Pils), c’est de soutenir l’amertume par une bonne base maltée. C’est pourquoi Matuska, une des meilleures brasseries artisanales tchèques brasse aussi ses stouts, IPA, pale ales par décoction.
Mon expérience de la décoction
Libre à toi de brasser par décoction selon tes envies. Personnellement le brassage d’une Tmavé, lager noire tchèque m’a fait passé le cap. Une expérience ultra-positive, la bière ayant vraiment pris un goût malté, toasté très agréable.
J’ai réalisé une petite pause protéine à 50°C puis j’ai extrait 1/3 de la maische pour atteindre les 64°C puis j’ai extrait 1/4 de la maische pour atteindre 69°C. Une double décoction donc !
La triple décoction démarre avec une acidification de la maîche, comme certaine lagers étaient brassées avant. En effet, l’acide lactique que l’on connait aujourd’hui n’existant pas, il convenait de descendre le pH à 4.8 afin d’obtenir un rendement optimal avec l’eau très douce de République-Tchèque. C’était donc acid rest à protein rest à empatage beta à empatage alpha.
Petite astuce, pour la Tmavé, j’ajoute les malts noirs au moment du rinçage pour éviter d’extraire trop de torréfaction, ce qui pourrait être gênant sur une lager à 4%.
Et toi, quel est ton expérience de la décoction ? Quelle bière as-tu déjà réaliser avec cette technique ? Es-tu content du résultat ?