La bière artisanale sera-t-elle un jour considérée dans l’économie française ?
Cette semaine, dans le cadre de nos prises de parole des organisateurs de la Paris Beer Week, nous invitons PEK de Bière à la main pour nous parler de la place de la bière artisanale dans l’économie française.
Depuis 5 ans que je me suis lancé dans le brassage amateur avec mes copains Antoine et Néville, j’ai pu voir l’évolution -exponentielle- du marché de la bière artisanale française. Nous sommes passés à plus de 700 micro-brasseries en France, certaines étant désormais connues, et reconnues, au niveau international. Le nombre de caves et de bars à bière a explosé, tandis que nos chers détaillants ont une multitude de références et de styles à nous proposer. Même les restaurateurs, petits ou grands, commencent à s’intéresser à la bière artisanale et à comprendre que proposer une Heineken dans leur carte des boissons revient à faire figurer de La Villageoise dans la carte des vins. Enfin, le brassage amateur ne cesse de se développer : là où, il y a quelques années encore, il n’était possible de se fournir en matériel et matières premières que sur internet, voilà que le brassage amateur est devenu suffisamment intéressant pour qu’il justifie l’ouverture de commerces liés uniquement à lui. Toute cette évolution particulièrement enthousiasmante m’amène à cette question : quand est-ce que la bière artisanale sera réellement considérée dans l’économie française ?
Au gré de mes différentes rencontres et échanges avec les acteurs de la scène brassicole française : cavistes, gérants de bar, distributeurs et bien entendu brasseurs, je me rend compte que la principale difficulté rencontrée est souvent celle du financement. Ce constat est particulièrement criant chez les brasseurs : métier à la base de notre passion, dont dépend tous les autres, et qui nécessite certainement le plus d’investissement ! La plupart de nos meilleurs brasseurs sont souvent autodidactes (vive le brassage amateur qu’ont vous dit !) mais aussi autofinancé. Ce qui les condamne, généralement, à plusieurs années de « Brewlaloose » avant de faire évoluer leur outil de production à la hauteur de leur talent, et aux volumes adaptés à la demande du marché. J’ai récemment pu faire la rencontre d’un duo de jeunes brasseurs particulièrement talentueux qui était catastrophé de constater que leur premier brassin à peine embouteillé était déjà vendu : « Eh les mecs, faut pas flipper comme ça, c’est si vous n’arriviez pas à vendre vos bières qu’il faudrait s’inquiéter ! ». D’autres brasseurs en devenir de ma connaissance ont récemment vu leur prêt bancaire refusé sous prétexte que le projet était « trop exotique » et que « le marché était déjà saturé ».
Quand un gouvernement comprendra que ce n’est pas en augmentant les droits d’accise sur la bière de 160% qu’il financera la sécu (la bière artisanale est très génératrice d’emploi à l’hectolitre produit…), que les patrons de bars ne se laisseront plus menés à la baguette par les multinationales de la pisse d’âne via les contrats brasseurs, et que les banquiers deviendront moins frileux pour prêter leurs deniers aux brasseurs, alors la bière artisanale pourra enfin prendre la place qu’elle mérite au sein de notre économie, tout comme elle l’a désormais acquise aux Etats-Unis.
PEK est un des créateurs de l’excellent et décalé blog Bière à la Main spécialisé dans le brassage amateur de bière. Un blog que l’on aime tout particulièrement car avec Bière à la Main, on apprend plein de choses sur le brassage en s’amusant à lire. Apprentissage et amusement, ça nous parle. Une véritable référence.
La Paris Beer Week 2016 se déroulera du 29 Avril au 8 Mai. Pour vous tenir au moût, suivez la page Facebook de l’événement.
Image à la une: Smit